Les Pionniers arrivent en Thandara...

- Mitra Tout Puissant, ne cessera-t-il donc pas de pleuvoir ? Sommes-nous bientôt à destination, sergent ?

L'homme qui passait sa tête de sous la bâche détrempée, et qui s'adressait au convoyeur, un soldat d'âge mûr couvert de cicatrices, vêtu d'une cotte de mailles ternie sous une pelisse en peau d'ours, était fort jeune, encore un enfant. Sa défroque noire sans ornements ne laissait subsister aucun doute sur son statut de novice dans le culte de Mitra.

Une voix retentit de l'intérieur du lourd chariot bâché :

- N'importunez pas notre ami le sergent Galbro, Sergio. Ne vous ais-je pas appris que l'impatience est mauvaise conseillère, que vous vous devez de vous absoudre de toute émotion, comme de la douleur ?

- Oui, Père Honorius. Je vous demande pardon.

Le sergent, qui dirigeait l'attelage d'une main sûre, se retourna à demi, pour lancer vers l'intérieur du chariot et ses passagers :

- Bah, ne 'l grondez pas mon Père. Depuis qu'nous avons quitté Tanasul, c'te bon dieu d'pluie nous a pas lâché. Il cracha bruyamment. Mais nous pouvons nous estimer heureux ! N'avons pas encore eu d'pépins jusqu'ici.

- Notre Père Mitra vous entende, sergent !

Des cavaliers chevauchaient à côté du chariot, courbés sur l'encolure de leurs montures qui marchaient têtes basses.

L'un d'eux, un géant Cimmérien dont l'épée magnifique dotée d'une gemme rouge dépassait de son manteau, se redressa soudain sur sa monture, montrant tous les signes d'une écoute attentive.

De l’autre côté du chariot, Zenzila s’ennuyait ferme sur sa monture.
Cette cadence imposée par l’allure du chariot était monotone, de plus sous cette pluie battante,
elle ne pouvait même pas fumer ses racines rouges qui s’éteignaient sitôt allumées.

Elle écouta les passagers, les prêtres de Mitra le père Honorius, un homme cultivé à la grande sagesse et
son jeune novice Sergio, impatient comme tous les jeunes gens de son âge.
Le convoyeur était un vieux sergent de l’armée aquilonienne qui escortait les prêtres ou les marchands dans ces régions lointaines de l’ouest de l’Aquilonie.
C’était un homme bourru, mais rôdé aux voyages, aux combats et qui partageaient ses nombreuses histoires de guerre le soir au coin du feu.

Dans le chariot, il y avait un couple de Tarantia qui allait ouvrir une échoppe de vêtements à Thandara.
Elle, Numa était bonne couturière et lui Pompilius avait apprit le tannage de son père.
A leurs côtés, deux jeunes frères Tullius et Taquin, ils avaient soif d’aventures et voulaient s’installer comme colons non loin du fort.
Ils y venaient pour pratiquer la menuiserie et l’art précieux de l’ébénisterie, les essences d’arbres étaient nombreuses dans le Westermarck et
Thandara avait besoin d’artisans de qualité. Ils abattraient les arbres, les débiteraient, les couperaient en planches et réaliseraient des meubles et différents ustensiles pour les colons ainsi que des palissades pour protéger le fort ou les habitations.
Ils avaient entendu parler de maisons sur pilotis et ils voulaient s’essayer à ces constructions.
Les deux jeunes hommes étaient riches d’idées, comme la plupart des pionniers qui partent le cœur rempli d’espoirs.

Zenzila souriait en entendant les espoirs des voyageurs qui rêvaient d’aventure et d’un monde meilleur.
Ils n’avaient sûrement pas entendu les légendes sur la férocité des Pictes.

Si elle était présente avec ses compagnons, ça n’était pas pour faire de la cueillette de myrtilles, mais bien affronter ces hommes féroces
aux lances et aux peintures de guerre qui mettraient un terme aux rêves des colons les plus imprudents.

Invité

Depuis quelque temps,les yeux noirs d'Herana était fixée sur les deux grandes oreilles de son cheval. Chaque minute, elle surveillait si c'est cheveux étaient trop mouillés, si sa nourriture nageaient pas comme des poissons, dans son sac.. La pluie l'empêchait de regarder la forêt au loin et la fatigue se fit sentir... Sous a cape et chaperon noir, elle regarda les différentes personnes présente. Mis a part son groupe, d'autre hommes et femmes avaient la même idée qu'eux : Vivre en terre Picte. Elle n'avait jamais vu un seule picte de sa vie et c'était le cas pour presque tout le monde.

Son regard noir se porta sur sa petite soeur, dans la chariot. Morte de froid, Kathleen s'était mise en boule sous 2 couvertures. Son sourire de malice, elle l'interpella.

-"Tu sais, Kathleen. Ça sera tout les hivers ainsi."

-" Merci de... me le... rappeler, Herana !" balbutia la pauvre jeune femme. Ses cheveux blonds était devenu tout mouillé par la pluie. Mais son visage était toujours resplandissant de pureté.

-"Tu as toujours cette idée en tête ?"

-" Oui... Je le souhaite, encore."

-"La nature, cela s'apprend. Comme toute chose."

-"Ne t'en fais pas pour moi, grand soeur. Je sais ce que je veux...".

Depuis leur départ des terres Hantées, la jeune prêtresse s'était mit en tête de devenir une protectrice de la nature. Quoi que mieux qu'une terre Picte pour apprendre la magie d'un chaman...

La pluie continuait de tomber trempant ses habits aussi sûrement qu’une cascade et coulant dans ses yeux malgré le bandeau de cuir autour de son crâne. Malgré l’épaisse végétation le sol était transformé en bourbier et ses bottes s’en extrayaient avec un léger bruit de succion. Autant pour la discrétion se dit Ghyl.
Il essayait cependant de se déplacer le plus discrètement possible, conscient de la vie foisonnante tout autour de lui qu’il ne pouvait voir mais qu’il percevait instinctivement. Ses instincts prenaient le dessus dans ce nouveau milieu qui lui était inconnu, le transformant quasiment en animal, toujours sur le qui vive, attentif aux moindres détails, prêt à réagir à tout ce qui pourrait le surprendre.

Ghyl savait qu’il lui faudrait un certain temps pour s’acclimater à se nouveau domaine mais il savait aussi qu’il y arriverait tout en espérant que le temps d’adaptation ne lui soit pas préjudiciable.

Il suivait un trajet parallèle à la piste boueuse sur laquelle cheminait la petite caravane celle-ci comprenant ses amis et quelques colons. Par Crom il préférait se déplacer dans le foret qui lui offrait quand même une légère protection contre les intempéries plutôt que de chevaucher. Il eut une pensée pour ses compagnons et un léger sourire effleura ses lèvres en imaginant une Zenzila râlant sous la pluie sans pouvoir abuser de ses petits plaisirs.

Il s’immobilisa net en entendant des bruits de tambours résonner dans l’air moite. Il savait par oui dire que les Kushites utilisait ce moyen pour communiquer mais c’était la premier fois qu’il entendait cela le son grave et répétitif évoquant pour lui le cœur de quelque monstrueux animal gigantesque.

Reprenant sa marche il parti de biais pour rejoindre la piste boueuse sur laquelle se trouvait la caravane et s’éloigna le plus silencieusement possible.

La végétation était abondante autour du chemin boueux et le chariot était maltraité dans tous les sens. La pluie battant contre les fougèrent et les flaques marronâtres atténuait les cliquetis des chevaux et du chariot. Le temps réduisait le champ de vision, tout semblait sans vie, comme au premier jour.

Killian avait la tête sur son menton, il dormait. La nuit, il prenait une grosse partie des tour de garde des autres, notamment celui de Zenzila pour qu'elle dorme tranquillement. Personne ne savait comment il réalisait cette prouesse, ses cuisses serraient l'animal et son corps arrivait à se tenir droit en se balançant légèrement. L'eau ruisselait sur sa tenue de cuir et son carquois débordait déjà. La pluie dégoulinait sur ses cheveux et perlait au bout de ses mèches sombres.

Un oeil expert pût voir la chair de poule sur les bras nus de Killian lorsque les soeurs parlèrent et doucement il releva la tête, les yeux encore endormis par sa sieste. Il bomba le torse pour faire craquer ses vertèbres puis bascula la tête d'un côté puis de l'autre avec le même bruit. Il regarda un moment autour de lui puis tourna son regard vers Zenzila non loin de lui. Il lui adressa un tendre sourire. La complicité établie entre eux n'avait cessée de croitre ces derniers temps et ils parvenaient à se comprendre d'un regard. Killian pensait que c'était l'âge qui apportait ce sentiment de plénitude comme une récompense aprés des années d'épreuves. Il lui fit un clin d'œil.

-Bonjour princesse.

Il regarda le ciel pour juger quel était le moment de la journée et ainsi évaluer la distance parcourue.

-On est plus loin.

Il s'imaginait déjà son paradis. Une régions ressemblant à la Cimmérie, sauvage, regorgeant de richesse et de paysages fabuleux sans compter la présence de ses amis.

Dieu que ce voyage était éreintant ! le jeune Kithanien ne pu réprimé un bâillement d'ennui qui lui arrache quelques larmes. Monté sur un cheval paisible et d'allure placide il contemplait le paysage tout en pestant intérieurement contre le mauvais temps. La matinée durant il avait amusé le jeune Sergio le pupille du père Honorius avec ses cabrioles, ses contorsions et ses tours de jonglage. Le jeune Aquilonien lui vouait une admiration toute particulière grâce à ses talents...qu'il était sot !
Malgré la proximité de leurs génération, le jeune homme n'avait rien de commun avec lui et il considérait Sergio comme un enfant un peu lourdeau dont il se débarrassait en feignant de ne pas comprendre la conversation, la barrière de la langue avait parfois bon dos.

La pluie avait trempée ses vêtements, que le reste de la caravane qualifiait d'exotique, et ruisselait sur son visage maussade. Il chevauchait non loin de Fearghal et le contraste avec le colosse était saisissant. Il était aussi petit que le Cimmérien était grand et paraissait chétif de prime à bord. Ce n'était cependant qu'une façade et son corps était aussi dur que l'acier, sec comme du bois mort. Il était jeune, peut être 17 ou 18 ans, guère plus. Il n'était ni beau, ni laid, son visage ayant quelque chose d'insaisissable le rendant ainsi passe partout comme si ses traits étaient flous ou imprécis, dans son pays du moins. Car ici, tout était différent. Ses yeux en amandes et ses cheveux d'un noir de jais aussi fins que la soie attirait les regards comme s'il avait été un animal exotique ou disparu !

Il soupira à nouveau et sortit 3 petits balles de cuir pleines de sables d'une des sacoches de sa selle avant de commencer à jongler d'un air détacher, comme si c'était pour lui aussi naturel que le fait de respirer. Taku le jongleur ! ce rôle lui plaisait bien...en fait il avait un engouement sincère pour tout qui avait un rapport avec cette vie d'amuseur et le fait de prendre régulièrement la route lui plaisait bien. Il sourit avant de poser ses yeux sur la nuque de Fearghal, se demandant intérieurement comment il s'y prendrait s'il devait tuer un colosse de cet acabit.

Le Cimmérien amena son cheval gris vers l'avant du chariot, et se pencha sur sa selle pour parler à mi-voix à Galbro.

- Ouais, répondit celui-ci sur le même ton de confidence. Moi aussi, j'les entends. Mais c'est plutôt bon signe.

Le jeune Sergio passa à nouveau sa tête de sous la bâche, l'air inquiet.

- Quoi ? Qu'est-ce que vous entendez ? Qu'est-ce qui est un bon signe ?

Le sergent mit quelques secondes avant de répondre.

- Les tambours Pictes, lâcha-t-il simplement.

Dans le chariot, l'atmosphère était moite. La chaleur des corps assis les uns contre les autres et la semi-pénombre qui régnait sous l'épaisse bâche oppressaient la fille magnifique, à la peau brune et aux cheveux de soie noire, qui de temps en temps se retournait pour regarder par une fente par dessus son épaule. Quelques instants auparavant, la blonde Kathleen avait carrément passé la tête à l'extérieur, sans autre résultat que d'être trempée.

Laella, elle, n'était pas aussi irréfléchie que la jeune fille. Elle savait qu'il n'y avait pas grand chose à voir là dehors, si ce n'est une fore^t sous la pluie, comme elle en avait vu en Cimmérie. La seule différence était la température clémente. Certes, il faisait froid, surtout pour une femme qui avait passé son enfance dans les déserts brûlants d'Iranistan, mais c'était sans commune mesure avec le froid mordant des collines du Nord.

Collant son œil à l'ouverture dans la toile, elle avait une vue sur cet étrange jeune homme qui les avait accompagnés jusqu'ici, et qui se rendait lui aussi en Thandara. Cela ne l'étonna pas outre mesure, car les Provinces du Westermarck étaient relativement jeunes, et cela attirait de jeunes gens de tous types, cherchant là une nouvelle opportunité de carrière, ou pourquoi pas, la fortune.

Le jeune homme semblait de ces êtres intrépides et courageux, qui malgré le jeune âge, n'hésitaient pas à se lancer dans une entreprise hasardeuse, même s'il y avait des risques. Elle examina la silhouette svelte, presque maigre, à la peau légèrement cuivrée et aux yeux en amande, comme ceux d'un Hyrkanien. Mais ses traits étaient plus purs, plus délicats que ceux d'un Hyrkanien.

Quand il sortit des balles de cuir pour jongler malgré la pluie, elle apprécia son talent, elle qui avait assisté aux représentations des meilleurs artistes devant son seigneur et maître, Kobad, Shah d'Iranistan. En regardant la virtuosité du garçon, elle rêvassa de cette existence passée au sein du palais du Shah, car elle y avait été houri.

Invité

Kathleen était lasse, ce voyage était long et la pluie la rendait encore plus triste. Ses cheveux étaient tout mouillés. Froid et humide. Elle s'agrippait du mieux qu'elle pouvait sur ses deux maigres couvertures. Le froid, n'était non plus sa température favorite.

Puis, de ses yeux d'émeraudes, Kathleen tourna le regard vers cette étrange femme aux origines ensoleillés.

-"Euh, Laella.... Laella ? Tu n'as pas froid ? J'ai terriblement froid... Vivement que nous atteignons le fort. Je me suis toujours demandée comment était le Vanaheim... Ma soeur m'en a très peu parlé. Vous avez du avoir froid, non ? Les nuits étaient plutôt glaciales. Si deux couvertures ne me réchauffe pas.. Je me demande comment vous faisiez durant tout ces nuits avec ce froid. Moi j'aurais préféré rester en bas des glaciers !""

Kathleen l'extirpa de sa rêverie en lui rappelant des souvenirs pénibles. La jeune fille grelottait. Numa, assise en face de la blonde, passa une couverture sur les frêles épaules.

- Hein ? Oui, moi aussi, répondit Laella distraitement. "Le Vanaheim... terre de glace et de... glace." Elle soupira. "Moi aussi, je me demande comment j'ai survécu."

Les fameux tambours ! il les avait entendu aussi bien évidemment. Ce qu'il ne comprenait pas, c'était pourquoi le sergent affichait un calme aussi parfait...depuis quand des tambours de guerre étaient-ils annonciateur de "bon signe" ?
Il grimaça tout en rangeant ses balles dans la sacoche d'où il les avait tirées avant de se porter à hauteur de Fearghal d'une pression des talons sur les flancs de sa monture qui s'ébroua doucement.

-"Pardonnez mon ignorance Messire Fearghal, mais pourquoi est-ce si négligeable ? ne devrait-on pas plutôt éviter de trop s'en approcher ?"

Invité

Kathleen remercia la gentille femme, Numa. Elle voyait très bien que le Vanaheim n'était sa discussion favorite. Elle changea de sujet.

-"Et c'était bien avec ma soeur ? Je la connais si peu... Et pourtant j'ai l'impression de la connaître depuis des années... Peut être se dire que tu as une famille qui te protège, qui te chérie..... Laella, comment tu l'as trouve ? Herana, elle est toujours aussi... énervé, irritante. Elle était comme ça tout le temps ? Oh, si je te gène... Pardonne moi."

Sous son regard de jeune enfant, Kathleen regarda de ses yeux verts, Laella...

Ghyl s'était bien orienté il arriva assez rapidement à la piste boueuse portant les marques recentes du passage de chariot et de chevaux.

Il partit au petit trot remontant le tracé vers la direction prise par la caravane le son lancinant resonnant toujours dans l'air. La pluie continuait à tomber mais elle n'était rien comparée aux rudes hivers cimmeriens, au pire génait elle un peu la visibilité sur une longue distance.

Il parvint assez rapidement à rejoindre la caravane et se dirigea rapidement vers Fearghal qui discutait avec le jeune étranger Katu.

Déjà plusieurs jours que la pluie tombait sans discontinuer. Trempant jusqu’aux os hommes et animaux.

La petite caravane de pionniers allait tranquillement sur le chemin boueux à travers la forêt dense, et le grand stygien toujours vêtu de son éternel long manteau sombre à capuche l’accompagnait chevauchant lentement à l’arrière, comme à son habitude en retrait du chariot .

Le ciel gris de nuages était bas, comme le moral des voyageurs. Une grande lassitude semblait toucher l’ensemble de la caravane.

Ces contrées reculées et sauvages seraient sûrement une retraite sûre pour le stygien. D’ici, il pourrait facilement lancer ses attaques discrètes et brutales contre les séides de Thoth-Amon.

Le jeune Taku, penché sur sa monture attendait une réponse du géant Cimmérien, mais ce fut le sergent qui lui répondit, tout en maniant les rênes des chevaux d'une main sûre.

- Négligeable ? Où vas-tu trouver que c'est négligeable ? J'ai juste dit qu'c'était bon signe. Ça veut dire qu'on est presque arrivés. Quant à n'pas s'en approcher, ça m'parait difficile, p'tit.

Il ajouta après un silence lourd de sens : "On est sur leur territoire."

Le vétéran se tourna à demi pour s'adresser à chacun, d'une voix calme : "Bon, à partir de maint'nant, nous allons avancer en silence. Je ne veux pas entendre de bruit plus fort qu'cette maudite carriolle."

De l'intérieur du chariot, la voix inquiète de Numa se fit entendre : "Et s'ils nous attaquent..."

Galbro la coupa : "Ils ne nous attaquerons que s'ils savent que nous sommes là. Ces tambours n'annoncent pas la guerre, je pense."

Fearghal demanda alors : "Pourquoi ?"

- Parce que le rythme est trop lent, écoute ! Non, c'est aut'chose. Comme... oui, c'est ça, comme qui dirait une cérémonie funèbre.

Zenzila savourait ces instants où toute la troupe était réunie.
Tous ses amis l'entourait Fearghal, Herana, Ghyl, et les autres, sans oublier son compagnon,
toujours bienveillant envers elle .

On entendait les tambours des pictes, ils battaient à un rythme lancinant signe d'une procession funèbre
ou d'une commémoration mortuaire.

Elle avait entendu ces rythmes lors de son voyage aux Royaumes Noirs, les Amazones utilisaient le même
langage rythmique.Enfin la pluie se fit moins forte, elle en profita pour allumer une de ses racines rouges.

Le voyage était interminable, et tous priaient pour qu'il se termine pour pouvoir fouler le sol fertile de la Thandara.
Même si le sergent et les colons étaient de bonne compagnie.
Zenzila en avait assez de cette procession qui était aussi lente, ce qui risquait de diminuer leurs réflexes en cas d'attaque.

Depuis Tarantia, au long de leur périple pour les contrées sauvages du Westermarck, le Stygien avait entendu de nombreuses légendes sur les inquiétants habitants des forêts séculaires de l'ouest de l'Aquilonie.
Et toutes ces légendes avaient un point commun : la discrétion des Barbares Pictes n'avait d'égale que leur cruauté.

Ce chemin sinuant au travers la Forêt était idéal pour une embuscade. Au dessus de leurs têtes, les frondaisons des immenses arbres se rejoignaient presque, à tout moment une horde sauvage pouvait surgir des sous-bois de parts et d'autres de la caravane.

La pluie avait presque cessé.
Même pour un médiocre archer, un cavalier au pas était maintenant un cible facile.

L'Ombre Stygienne glissa lentement le long de sa monture afin de cheminer à ses cotés, et, dans le même temps, dégagea la poignée bleu nuit d'un long sabre placé dans un paquetage sur la croupe du cheval.

A mesure du chemin, les cliquetis métalliques des harnachements des montures et les craquements des roues de l'unique chariot de la caravane étaient les seuls bruits dans la forêt sombre et humide.

Observant attentivement la luxuriante végétation environnante, Messyahn prit une feuille de Khat noir qu'il commença à mâcher.

Ghyl se rapprocha de la caravane et héla Fearghal voulant eviter de se faire prendre pour un ennemi par un de ses compagnons qui devait surement être aux aguets dans ce nouvel environement.

-"Fearghal".

Le jeune homme se renfrogna soudainement et ne dit plus un mot. Ce soudard le traitait comme un enfant et il avait horreur de ça. A la lumière de ses nombreux talents, il était habitué chez lui à être traité avec respect et bien qu'il soit à l'aise dans son personnage cet aspect de sa vie lui manquait de plus en plus. Freinant légèrement sa monture il se porta à nouveau à hauteur du charriot tout en reprenant son air enjoué de composition.

Il ne pouvait toutefois s'empêcher de penser aux pictes qui rodaient alentours, s'ils attaquaient les choses prendraient une tournure gênante...il n'avait sur lui qu'un poignard et quelques couteaux de lancé aussi se résolut-il à prendre la fuite en cas d'attaque, après tout ce n'était pas son devoir que de protéger cette caravane de pèquenots loqueteux, il laissait ça aux guerriers de métier ! le plus à craindre était en fait que sa cible soit tuée en cas d'attaque ce qui solderait sa mission d'un échec...d'un autre coté les risques encouru en se rendant dans ses contrées n'étant pas inconnus de son commanditaire, il se plu à penser que ce dernier ne lui tiendrait pas rigueur de l'échec et ne lui réclamerait pas de remboursement...

- Enervée ? Irritante ? Non... on voit que tu ne la connais pas bien. Herana est douce et tendre avec ses amis, tout autant qu'elle est colérique et... sauvage vis-à-vis de ceux qu'elle n'aime pas. Mais dis-moi, comment se fait-il que tu aies les cheveux blonds ? Je pensais que tous les Cimmériens étaient bruns ?

Invité

-Oh, la jeune blonde sourit, c'est du à ma mère. Ma mère était une Aesir, les barbares du nord. Ils sont tous comme moi, blonds. Au début, j'avais posé la même question à Herana. Notre mère était bien une femme blonde. D'après ma sœur, elle fut combattante dans de grandes batailles... Mais, Herana n'en sait pas plus... Après avoir combattu, elle croisa le chemin de notre père, un vrai Cimmérien ! La suite, c'est facile à deviner, disait elle avec son rire cristallin.

-"Herana m'avait dit de bien jolies choses sur toi... Elle t'aime vraiment. Comme Killian, Zenzila, Ghyl et même cet homme étrange, Messyahn. Je me demande comment elle aurait pu survivre sans toi au Vanaheim, tu lui as été d'un grand soutien...".

La belle secoua la tête.

- Moi, d'un grand secours ? Oh non, c'est l'inverse. Ta sœur est forte, tu sais. Les épreuves qu'elle a subi par le passé l'ont endurcie et ont fait d'elle une vraie guerrière. Moi, j'ai toujours vécu dans le luxe et la facilité. La vie en Cimmérie et au Vanaheim s'apparentaient plus à l'enfer, pour moi. Sans Herana, je serais probablement morte.

Ghyl, courbé en deux, se porta à hauteur du géant sur sa monture.

- Fearghal...

Celui-ci se pencha vers le jeune homme, qu'il considérait comme son petit frère.

- Oui, Ghyl, répondit-il à voix basse. Nous avons entendu. D'après Galbro, ce serait une cérémonie. Tu as une idée d'où ça vient ?

Ghyl acquiesça en montrant une direction.

- A peu près un kilomètre par là, il doit y avoir un village.

-« Je prends un peu d’avance pour voir sur quoi on risque de tomber si il y a le moindre problème je vous rejoint de suite tenez vous prêts au cas ou je ne reviendrais pas seul », dit il avec un petit rictus sur les lèvres.

Continuant sur sa lancée il continua à avancer à petites foulées devançant la caravane avant d’obliquer vers le bord de la forêt pour y pénétrer de quelques mètres. Il savait par oui dire que les Pictes étaient des chasseurs et des combattants dangereux aussi voulait il éviter de trop s’enfoncer dans la forêt encore méconnue mais ou les Pictes devaient évoluer comme des poissons dans l’eau.

Une fois franchis les premiers arbres tous ses sens aux aguets c’est comme un fauve qu’il continua son avancée prêt à réagir à la moindre menace. Au bout de quelques minutes il s’arrêta saisi par un instinct animal. Aucun bruit ne résonnait dans les sous bois et pourtant il sentait une présence, quelque chose qui lui voulait du mal.

Son regard vif scrute tout autour. Rien juste la luxuriante végétation qui camoufle et habille quiconque s’ y blottit. Pourtant il y a quelque chose il le sait.

Comme une panthère il évolue, se familiarisant avec son environnement jusqu’à en percevoir la moindre vibration et soudain il sait. Il est suivi, le petit frisson sur sa nuque l’avertit d’un danger. Son instinct l’a plus d’une fois sauvé et il sait qu’il doit s’y fier. Il se tient prêt sentant la mort arriver, le sang va couler mais se ne sera pas le sien.

Dans une soudaine explosion les frondaisons éclatent au dessus de lui mettant à jour un Picte au corps puissant et musclé qui se laisse tomber sur lui. Mais dés le premier craquement Ghyl a bondi rapidement sur le coté ses haches à la main attendant son adversaire. Du moins espère t il qu’il n’y en ait qu’un.

A peine au sol le Picte bondit sur lui avec dans les yeux une légère surprise pour avoir loupé son traquenard. Une dague dans une main, une hache dans l’autre il se jette sur lui un rictus déformant ses lèvres qui laissent échapper une sorte de sourde mélopée. Laissant choir ses haches Ghyl saisit chaque poignet de son adversaire bloquant ainsi les bras.

C’est un duel de puissance brute et de volonté qui a lieu, le Picte est plus petit que Ghyl mais plus lourd véritable bloc massif de muscles saillants il force comme un taureau. Ghyl est plus grand mais plus athlétique compensant par sa souplesse la puissance supérieure de son adversaire. Celui-ci est collé contre lui leurs torses sont en contact l’un contre l’autre tandis que leurs bras noues sous l’effort sont à la perpendiculaires par rapport à leurs corps.

Le Picte exhale une haleine nauséabonde alors que dans ses cheveux de nombreuses plumes bougent au rythme de leurs mouvements, des yeux noirs comme la suie fixent Ghyl remplis d’une haine absolue.

Les deux hommes sont figés dans leurs efforts tels deux statues et soudain Ghyl réagit, utilisant un tour appris au Kithai il se laisse souplement tomber au sol attirant son adversaire à lui, glissant ses pieds sous le ventre dur comme de la pierre avant de projeter puissamment dans les airs lui faisant effectuer un vol de quelques mètres.

Ghyl se relève rapidement, ses haches sont bien là ou il les a laissé tomber leur fer planté dans la terre, les manches prêts à être saisis. Le Picte se relève vacillant sur ses jambes, un cri de rage s’échappant de ses lèvres, cri soudainement interrompu par la lame planté dans son crâne macabre mat qui laisse jaillir le sang et la vie.

Le jeune cimmérien s’approche rapidement du corps, par Crom et Ymrir si tous les Pictes sont comme celui-ci les journées ne vont pas être ennuyeuses.
Il récupère sa hache attentive aux bruits alentours et détecte de nombreux cris et hululements venant dans sa direction. S’orientant rapidement il rebrousse chemin retournant vers la caravane.

Si les Pictes sont trop nombreux et surtout du même acabit que son adversaire il ne pourra pas en venir à bout et l’aide de ses compagnons lui sera très profitable.

S’élançant dans la forêt il cours rapidement faisant fi de la discrétion, il se sait traqué mais il ne souhaite pour l’instant que rejoindre la caravane, par Morrigan au diable la discrétion.

Comme une flèche il galope se rapprochant de la piste lançant de temps en temps un tronituant PAR CROM pour avertir Fearghal et les autres.

Voyant Ghyl revenir à toute vitesse, Fearghal porta la main à son dos pour dégaîner sa magnifique épée.

- Protégeons le chariot et restons groupés ! cria-t-il à ses compagnons, Taku, Zenzila et Killian, qui étaient chacun sur un cheval.

- Ghyl, que se passe-t-il ?

Mais celui-ci n'eut pas besoin d'en dire davantage, car un concert de cris et de hululements répondirent à sa place, venant de l'avant du convoi.

- Par Crom ! Killian, ton arc ! Ghyl, monte sur le chariot, tu auras l'avantage de la hauteur ! Zenzila, Taku, avec moi !

Faisant de grands moulinets avec son épée, il talonna sa monture qui s'élança soudain en avant. Il lança Greyling en une charge aveugle. Il ignorait la force des adversaires en face, mais c'était réciproque. Le barbare voulait garder l'avantage d'une charge surprise pour essayer de réduire le nombre de leurs assaillants, et qui sait, pour les mettre en déroute.

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